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mardi 6 juillet 2010

Aéroport de brousse...

Je peux désormais rajouter une nouvelle anecdote à ma longue listes de voyages mémorables. Hier matin, départs en vacances obligent, j'étais déjà angoissée à l'idée de la forte affluence, des enfants ingérables, de la chaleur et des perturbations dues à d'éventuelles grèves (on est Parisien ou on ne l'est pas) : je mets au défi quiconque de n'avoir jamais redouté au moins un de ces facteurs !
Toujours est-il que je me lève à 6h du matin pour prendre le car d'Air France à 9h. Quand enfin j'arrive à l'aéroport d'Orly Sud, je trouve une queue impressionnante aux comptoirs d'enregistrement de Tunisair, pour mon vol qui est supposé décoller à 11h55 pour Tunis.
La file avance très lentement... jusqu'à ce que toutes les lumières de l'aérogare s'éteignent subitement. La file d'attente n'avance plus. Au bout d'une demi-heure d'attente sans aucune explication, je tente de glaner quelques renseignement ici et là avec quelques passagers impatients. Il semblerait que la panne d'électricité soit généralisée et concerne tout l'aéroport : de mieux en mieux. J'ai soudain une furieuse envie pressante... à force de boire pour compenser la chaleur ambiante, l'air conditionné étant coupé et les passagers s'accumulant toujours plus nombreux dans le hall. Direction les toilettes au sous-sol. Bien évidemment, pas de lumières non plus, et c'est dans une joyeuse obscurité que les dames pipi indiquent aux voyageuses les toilettes libres ou occupés. Passées les quelques secondes de panique, mon esprit débrouillard reprend le dessus : je sors alors mon téléphone portable, active la fonction spot lumineux de l'appareil-photo, et tente d'y voir plus clair une fois enfermée dans ma cabine plongée dans le noir. En sortant des toilettes, les voyageuses impatientes s'enthousiasment de cette technique improvisée, et sortent à leur tour leur téléphone : quand la technologie crée des liens...
De retour dans la file d'attente de l'enregistrement des bagages, toujours aucun changement. Deux heures plus tard, après qu'une responsables des comptoirs de l'aéroport ait échappé à la fureur du responsable de la compagnie aérienne, incrédule tout comme ses passagers face à l'absence de réaction d'ADP (Aéroports de Paris), un autre comptoir d'enregistrement nous est enfin alloué. La foule se presse dans le plus grand chaos, les esprits s'échauffent, le thermomètre aussi. Il est 12h30, notre vol aurait du partir il y a déjà 35 minutes : nous sommes à peine débarrassés de nos valises.
Direction ensuite le contrôle aux frontières, où l'affluence reste gérable. 
Le désespoir nous gagne lorsque nous arrivons dans la salle du contrôle de sécurité des bagages à main et des personnes. Plus d'électricité signifie que les portiques de sécurité ainsi que les scanners à rayons X sont hors service. Une file en zigzag d'environ 300 personnes qui attendent patiemment leur tour, dans une chaleur incomparable, improvisant un petit ventilateur manuel avec leurs passeports et leur billet d'avion. Pas une bouteille d'eau n'est distribuée. Trois personnes ont déjà fait un malaise, dont un jeune adolescent. Les douaniers ouvrent tous les bagages, et vident l'intégralité de leur contenu dans des casiers en plastique, afin de procéder à une fouille manuelle minutieuse. Tous les paquets, même cachetés, sont systématiquement démembrés : boites de bonbons et de chocolats des enfants, protections hygiéniques pour mesdames. Un fromage réputé fini même à la poubelle, au grand désespoir de son propriétaire (la pâte pourrait être dangereuse...). Des petits pistolets à eau en plastique pour enfants sont examinés sous toutes les coutures, puis finalement confisqués : petits voyous en herbe ! Les ordinateurs portables sont allumés, afin de vérifier qu'il s'agit bien d'un instrument technologique fiable... C'est ensuite une fouille au corps très minutieuse qui est entreprise... je passerai les détails de cette expérience. En moyenne : comptez 10 minutes par passager, pour 6 ou 7 comptoirs opérationnels, et 300 passagers dans la file. Je vous laisse imaginer la rapidité de la procédure. Il est 13h45. Un agent de sécurité demande à un membre du personnel de l'aéroport ce qu'il en est de l'avancé des réparations : "une équipe vient d'arriver pour résoudre le problème" : cela fait presque 4 heures que la panne a eu lieu. L'exaspération est à son comble. Les agents avec qui nous discutons sont blasés : selon eux, l'aéroport d'Orly est l'un des pires de France. Etat des infrastructures lamentable, entretien quasi-inexistant... Ces allégations sont confirmées par les commerçants de la zone "free-shop" précédant la zone d'embarquement : certains me disent qu'ils se demandent chaque matin à quelle catastrophe ils auront à faire face dans la journée.
Nous embarquons finalement dans l'avion, pour décoller à 14h30. Nous aurons eu au total 2h30 de retard, sans qu'aucun responsable de l'aéroport ne vienne à la rencontre des passagers pour s'excuser.
Ce matin, je lisais dans la presse en ligne (lire l'article et les réactions des passagers et des employés ici) que ces mêmes responsables se voulaient rassurant, affirmant que seuls les compagnies Corsair et Royal Air Maroc avaient étaient touchées par ces perturbations (faux, si Tunisair a été oubliée, combien d'autres n'ont pas été citées ?) et que les retards n'avaient été estimés qu'à 30 minutes en moyenne. 
"Toutes les installations électriques et électroniques ont été impactées" par cette panne. Mais "les conséquences pour les passagers sont minimes".
Par ce communiqué d'une mauvaise foi honteuse et déplacée, comment faire confiance à cette infrastructure internationale censée accueillir et raccompagner des millions de voyageurs étrangers tous les ans, dans les meilleurs conditions ? Quelle belle image de la France garderons ces visiteurs une fois revenus dans leur pays ? Si un simple dégât des eaux entraine un tel chaos et une prise en charge aussi désastreuse de la situation, à quoi faudrait-il s'attendre en cas de "crise majeure", dans un contexte de tensions mondiales importantes ou la sécurité intérieure est considérée comme une priorité ?

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